René Arped Spitz, un psychanalyste d'origine hongroise, a montré que si l’on prend soin de bébés en respectant leurs besoins vitaux (alimentation, sommeil, hygiène) sans néanmoins établir avec eux un contact affectif, ces enfants dépérissent jusqu’à se laisser mourir. Ce syndrome constaté dans les orphelinats roumains dans les années 70-80 et dans les pouponnières de la France d'après-guerre a été nommé par Spitz « hospitalisme ». Une telle attitude de la part des personnels était explicable du fait qu'à l'époque « la psychologie des enfants n'était pas d'actualité. On pensait que leur comportement était dû à leur hérédité : parents alcooliques, syphilitiques ou pourquoi pas attardés de génération en génération. »
Récemment, des radiologues américains ont étudié le cerveau d'enfants roumains de 9 ans n'ayant connu que l'orphelinat avant l'âge de 3 ans : il s'avère qu'il « présentait, des années après, des séquelles irréversibles : les zones cérébrales impliquées dans les émotions étaient moins développées que celles des autres enfants [...] le QI de ces enfants se situait autour de 80, c'est-à-dire bien en dessous de la moyenne . » Ainsi, établir « une relation affective, un lien d’attachement, avec un autre être humain, est donc un besoin vital. [...] Nous sommes nés pour former des liens d’attachement, nos cerveaux sont construits pour se développer en tandem avec un autre cerveau humain, à travers la communication émotionnelle, avant même le développement du langage » dit Allan Shore, un neuropsychologue et neuropsychanalyste américain contemporain. » Le bébé va « chercher du confort, du soutien émotionnel et de la protection, en même temps qu’apparaissent l’angoisse vis-à-vis de l’étranger et la protestation en cas de séparation. » S'établissent des « connexions émotionnelles entre les personnes qui sont en relation d’intimité. » avec « la confiance dans l’idée qu’une figure de soutien, protectrice, sera accessible en cas de stress, danger ou désarroi,et ceci quel que soit l’âge de l’individu. Si l’enfant a construit une base de sécurité alors il peut explorer le monde qui l’entoure en confiance. »
Enfin, « le type d’attachement tend à se transmettre d’une génération à l’autre. Par exemple, dans la mesure où le parent a été amené à exclure défensivement certaines informations (en niant par exemple le sentiment d’avoir été rejeté par ses propres parents), il ne peut y être sensible chez les autres, et en particulier chez son enfant. Cette insensibilité non-intentionnelle l’empêche de réguler son comportement en fonction de ce qu’exprime son enfant, et le conduit à répéter avec lui des attitudes peu sécurisantes. Les besoins de l’enfant ne sont ainsi pas pris en compte, ce qui l’amène à être confronté aux mêmes types d’émotions que celles que son parent a dû affronter et le poussent à développer des défenses similaires. Cette transmission n’est pas une fatalité et peut être évitée par le parent [...] et nécessite une difficile remise en question des propres modes d’appréhension des relations. Un milieu sécurisant peut aider à cela. Se sentant sécurisée et aimée, la personne est plus à même de revenir sur les moments douloureux de son passé qui l’ont poussé, autrefois, à figer ce modèle interne opérant pour se défendre contre l’intolérable (par exemple le fait d’avoir été abandonné), en excluant des informations trop douloureuses, et ce faisant, en figeant ce modèle sans le « mettre à jour » dans les nouvelles interactions avec l’environnement. »
Sources : Les étapes du développement de l’enfant d'Anne Carpentier, psycho praticienne Gestalt thérapeute, et Allodocteurs.fr
Florence Tornier
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